mardi 8 février 2011

Balade photographique avec le Parc de Camargue (suite) : Beauduc

Nostalgique, cette balade à Beauduc. Un de ces jours de mistral sans soleil, à l'envers, où le gris bleu se fond dans le gris rose et le gris lumière. 
Notre groupe a des airs de caravane sur la longue piste bordée de martelières, de ponts, de digues, des innombrables ouvrages qui signalent les salins avant de parvenir à la prise où les pompes, aujourd'hui inactives, envoyaient des milliers de mètres cubes d'eau salée vers les partènements.
Faraman, à bâbord, la Gachole à tribord, le golfe de Beauduc se fond entre sable et mer. 

Vers la Gachole, c'est le domaine de l'Etat, toutes les cabanes ont été rasées, y compris les restaurants  "Marc et Mireille" et "Chez Juju". Quelques pêcheurs de tellines et de muges sont toujours là pourtant, quelques cyclistes courageux, et un jeune dauphin bleu et blanc, échoué sur la plage.
Dans les vagues on distingue des groupes de macreuses, portées par la houle. Sternes, fous de bassan, goëlands, mouettes, tous les oiseaux de mer sont là. Le golfe de Beauduc joue un rôle de nurserie pour beaucoup d'espèces de poissons. Un réserve y est créée à l'initiative des pêcheurs dits petits métiers, et du Parc de Camargue. Entre les deux bras du Rhône, les fonds sableux changent constamment, pièges pour les bateaux : 17 épaves dorment dans le golfe.
Les flamants nichent à proximité, dans l'étang du Fangassier, seul site de nidification en France. Leur présence est favorisée par la création d'un îlot artificiel, à l'initiative de la Tour du Valat (Centre de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes), et par l'exploitation du sel, favorable à la prolifération de l'algue rouge dont se nourrit l'artemia, la crevette des flamants, celle qui leur donne la couleur du phénix. La diminution drastique et programmée de la production, en plus des problèmes humains qu'elle pose, renvoie la préservation de cet équilibre à la collectivité. Le parti pris est de laisser s'interpénétrer davantage les étangs et la mer, retrait stratégique.
Le conservatoire du littoral a récemment racheté 6000 hectares aux Salins du Midi, notamment le domaine de la Bélugue tout proche. 
De l'autre côté de la prise, on est encore dans le domaine des salins, et là, les cabanes sont encore debout, de bric et de broc, avec leurs piquets, leurs clôtures de filets et leurs planches délavées.

Dans les années 20, Carle Naudot a déjà photographié le pique-nique à Beauduc et les ruines de l'ancien phare de Faraman, aujourd'hui sous l'eau (à voir au Musée Camarguais). 
Un pluvier argenté s'immobilise dans les reflets, des courlis cherchent leur pitance et là-bas, devant le bateau de pêche, sur les pieux fichés dans les vagues, à côté de deux goëlands leucophées et commun, notre guide reconnaît un goëland railleur, beaucoup plus rare.
ll faut avoir l'oeil à Beauduc, un reflet, un éclair de soleil, un banc de sable, cadeaux ou orages du ciel et de la mer que les cabaniers ont toujours su recueillir ou détourner. 
Nous reviendrons aux beaux jours, la légende est tenace. Tout en haut de sa tour, la plus haute de Méditerranée, le fanal de Faraman vient de s'allumer dans la nuit qui gagne. 

Photos 2, 3, 4, 6, 7, ©Gudrun Bauer, voir l'album
Photos 1, 5, ©Isabelle Secretan, voir l'album
Taper "Carle Naudot" ou "Beauduc" dans la case recherche de la base Joconde (Ministère de la Culture) pour accéder aux photos.
Le site Beauduc, l'utopie des gratte-plage, par Laurence Nicolas, ethnologue. C'est aussi un livre : 2008 : Nicolas L, Beauduc, l’utopie des gratte-plage – étude ethnologique d’une communauté de cabaniers sur le littoral camarguais, Images en Manœuvre ed., Marseille.
"Beauduc, le paradis existait", sur le blog Impasse des Pas Perdus, plein de photos.
Le dossier de la Tour du Valat sur les flamants roses.

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