C'est une immense émotion de découvrir les photos de Vivian Maier, alignées sur les murs de pierre de la salle Daumier de Courthézon, dans le plus simple appareil, comme si elle venait de les accrocher.
Les tirages d'époque sont reconnaissables, ceux qu'elle a vus, gardés aimés.
Son village, Saint Julien en Champsaur est là, avec ses rues, son marché, ses habitants. Ils lui sourient, légèrement en contre-plongée, cadrés au niveau du buste par le Rolleiflex tenu à hauteur de poitrine.
©Isabelle Secretan |
Elle y est revenue une année, à l'âge de 25 ans, soudain riche de l'héritage de la maison familiale, qui lui a permis de se consacrer à sa passion de la photographie, puis en 1958. C'est de ces années 50 que datent les photos exposées.
Passion entretemps nourrie de l'amitié et des conseils de Jeanne Bertrand, dont le talent de photographe est remarqué par le Boston Globe en 1902. Française elle aussi, émigrée aux Etats-Unis une génération plus tôt, elle héberge Vivian et sa mère en 1929 et les accompagne au cours du premier voyage d'enfance dans le Champsaur.
Belle ramification du travail de John Maloof, le "découvreur" de Vivian Maier, l'exposition des photos Champsauriennes montre une autre facette de l'énigmatique photographe des rues américaines, apaisée, souriante au milieu des villageois qui la connaissent et l'ont vue grandir, une vision que l'Association Vivian Maier et le Champsaur contribue à faire connaître. Le passionnant livre de Françoise Perron consacré à Jeanne Bertrand rend ses grandes espérances plus familières encore.
©Alain Poggi |
Les photos d'Alain Poggi, sélectionnées à l'issue du concours sur la photo de rue, sont presque contemporaines puisque prises entre 1959 et 1968, à Marseille. Scannées, elles ont été traitées sous DXO pour restituer le rendu du support d'origine, et tirées en 30x45 pour garder les proportions du 24x36. Voilà comment Alain les présente :
" Dans les rues de mon enfance il y a Mireille et Renée, nos petites soeurs.
Dans la bande, nous les garçons, nous les protégions.
Il y a des coins secrets au sommet d'un escalier
Il y a nos sorties sur le vieux port.
Les bateaux sont notre aire de jeux.
Il y a l'école des filles, et les grands, les cacous. Nous les craignions et nous les admirions.
Des slogans germent sur les murs de la Joliette, l'ostracisme n'est jamais loin.
Dans les rues gronde la colère, en Algérie la France est en guerre.
Ce soir, à la télé, De Gaulle va nous parler.
Dans dix ans l'Algérie ne sera plus Française et Ben Bella ne sera plus là.
Des clochards, au petit matin, dorment sur les trottoirs.
Aujourd'hui, s'ils n'ont pas de papiers, ils auront des cartons.
Pendant ce temps, le jour, je capturais des images
dans ce monde où je vivais.
Marseille, Marseille années soixante.
La nuit sur les grandes ondes, j'écoutais les Stones.
L'enfance terminée, l'internat est arrivé.
Le soir, après l'étude, je quittais le dortoir pour te retrouver dans le couloir.
Le dimanche, dans les rues, je photographiais ton visage, un pont, ou les joueurs de pétanque."
©Isabelle Secretan |
Sans oublier les lauriers roses le long de la Seille, et les murailles de Courthézon où le Photo Club sait recevoir.
©Isabelle Secretan |
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