samedi 10 avril 2010

Photos de printemps sur le Petit Rhône avec chants d'oiseaux et Parc de Camargue

C'est au bord de la prairie fleurie du Château d'Avignon que nous retrouvons Frédéric, le guide naturaliste du Parc de Camargue. En évoquant avec gourmandise le triangle d'or de la biodiversité, entre Camargue, Alpilles et Crau, 3 écosystèmes totalement différenciés, il nous fait déjà lever la tête vers le mouettes mélanocéphales qui s'appellent au-dessus des arbres du parc : plus grandes et plus rares que les mouettes rieuses, leur tête devient également noire en été. Le soleil commence à chauffer pour cette deuxième vraie journée de printemps.

Vue générale, Frédéric survole le temps et l'espace : la rive nord de la Méditerranée, bordée de formations montagneuses de Gibraltar à Jérusalem, s'ouvre vers le nord avec un axe principal de communication, la vallée du Rhône. D'où, au Moyen-Age, l'importance des foires de Beaucaire où sur plusieurs centaines d'hectares et durant plusieurs mois s'échangeaient les marchandises du nord comme du sud.

La Camargue et la Crau sont un territoire jeune, 10.000 ans environ, formé par les alluvions du Rhône qui avait autrefois 7 bras, et de la Durance qui était un fleuve indépendant. A cette époque Arles devait être une île sur sa colline de calcaire. A la suite des derniers changements de cours du Rhône au 19° siècle, une partie du département du Gard au nord de Tarascon s'est retrouvée à l'est du Rhône, une partie du département des Bouches du Rhône au sud de Sylveréal s'est retrouvée à l'Ouest du petit Rhône, et la Crau n'a plus été lavée par les eaux : une croûte minérale s'est formée, résistante aux racines des arbres, et la plaine est devenue steppe. 
Le cordon littoral qui ferme la Camargue est mouvant : c'est au Grau de la dent, là où l'ancien lit principal du Rhône a creusé un "canyon" vers le large, que la mer avance le plus alors qu'à l'Espiguette la plage s'agrandit de 4 mètres par an.
La moitié de la superficie des Bouches du Rhône est classée en zone Natura 2000, protection européenne.

La mission de Frédéric aujourd'hui, est de nous faire mieux connaître la ripisylve du Rhône, autrement dit la vie des berges boisées. Il nous amène vers le mas de Baumelles où, occupés à trouver le chemin, nous manquons un circaète Jean-le-Blanc.

Arrivés sur la digue, un tapis d'asphodèles de Camargue (on cherche le vrai nom) nous fascine alors que retentit, comme un couteau, le cri bref du martin-pêcheur, et depuis la rive opposée, le "u-pu-pe" de la huppe fasciée. Les notes stridentes de la mésange charbonnière nous accompagnent le long  des tapis d'euphorbes et des peupliers blancs, entrecoupées de celles de la bouscarle de Cetti, très difficile à voir mais que nous entendrons souvent. D'où vient ce nom étrange, bouscarle de Cetti ? Le Larousse donne la réponse : la bouscarle est une "fauvette du bord des eaux, des régions méditerranéennes" et M.Cetti a bien existé, Francesco Cetti (1726-1778) mathématicien italien, naturaliste et auteur, a donné son nom a notre bouscarle qui, dans les années 1900, était confinée aux régions de climat méditerranéen, mais, depuis, s'est répandue vers le nord et a même été remarquée en Suède. Elle vit dans les marais, les buissons près des roselières, dans la végétation dense avec ronces et tamaris ainsi qu'à la lisière des champs de blés.  
  Les rainettes arboricoles (tree frog en anglais) s'en donnent à coeur joie et, belle surprise pour ce tout début de saison, les rossignols sont là, avec leurs longues trilles.

Autrefois des carrelets étaient installés au fil de l'eau et les habitants des Saintes pêchaient souvent plus de poisson dans le Rhône qu'en mer. Quelques pontons subsistent, parfois ensevelis sous les arbres déracinés ; une cabane se dissimule sous les branches, où le lustre et la boîte à sel parlent de l'hospitalité du cabanier.

Plus loin au bas de la digue, un sentier s'enfonce dans les roseaux, au ras de l'eau, chemin de cannes sous lesquelles nous cheminons un moment, parsemé d'aubépines. 


Les frênes ont leur pleine feuille alors que les ormes portent encore leurs chatons. 
Un milan noir plane longuement au-dessus de notre pique-nique. Quand il s'éloigne, son cri, porté par le mistral qui se lève, fait un peu penser à un hennissement, surprenant non ?

De l'autre côté de la digue des aigrettes et des garde-boeufs pêchent dans la roubine qui borde les champs de blé d'hiver au-delà duquel quelques perdrix s'envolent. Un grand oiseau bat lentement des ailes, cigogne ou héron ? Non, c'est bien un héron cendré, bien qu'en ce moment les cigognes nichent aussi dans la région.
Après une station de pompage désaffectée nous empruntons la petite route d'Astoin, marquée d'une croix montée sur un pilier de marbre sculpté d'une croix plus ancienne. 

La chaleur devient estivale. Les pousses des roseaux percent dans les roubines, les chevaux en raffolent. Sur un tamaris dont les bourgeons éclosent à peine, le plus ornithologue d'entre nous repère un rouge-queue.

La digue est plus fraîche et dans les creux d'ombre la brise se fait légère. Dans les arbres, les rainettes arboricoles sont montées si haut qu'on dirait des oiseaux.


* Les liens renvoient vers une fiche descriptive sur le site oiseaux.net : on peut y écouter le chant de chaque oiseau.
Photos de ce billet : ©Isabelle Secretan (1, 2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13) ; ©Alain Vielle (6, 14).
Pour voir l'album d'Isabelle, cliquer ici
Pour voir l'album d'Alain, cliquer ici
Voir aussi :
  • le site du Cogard (Comité ornithologique du Gard) ;
  • les photos d'oiseaux de Jean-Pierre Trouillas ;
  • dans Grain de Sable, la revue de l'association J'Aime Aigues-Mortes de mars 2010 l'excellent article et les photos de Francis Pellissier, "Aigues-Mortes à vol d'oiseau".

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire